J’ai rencontré une partie de l’équipe du Musée du Cinéma et du Miniature au Paris Fan Festival 2024. L’événement se tenait les samedi 27 et dimanche 28 avril 2024, au Parc des Expositions de Porte de Versailles. C’était l’occasion de découvrir le travail de l’établissement lyonnais. Tout d’abord via un entretien, puis avec la conférence de présentation.
Partie 1 : Entretien avec Julien Guyard du Musée du Cinéma
Le Musée du Cinéma et du Miniature au Paris Fan Festival 2024
Bonjour Julien, peux-tu te présenter rapidement ? Quel est ton poste au Musée Du Cinéma ?
Bonjour, moi c’est Julien [Guyard], je suis Production Designer au Musée du Cinéma. La traduction française c’est “chef déco”, mais le terme Production Designer est plus global. Car, principalement, j’ai la charge de redécorer toutes les salles du musée pour qu’elles soient immersives et interactives. Pour ça, je peux dessiner les designs comme les fabriquer. Mais aussi, je m’occupe de gestion de la réserve et de l’atelier.
(Julien Guyard est également le fondateur d’Atlante-Props. Il s’agit d’un atelier dédié à la création et la restauration d’accessoires liés à la franchise Stargate, ndlr)
C’est la 2e édition à laquelle vous participez au Paris Fan Festival. Peux-tu nous raconter comment s’est passé la prise de contact ?
Effectivement, on était déjà présent l’année dernière. En fait, le directeur du Paris Fan Festival (Jonathan Dumont, ndlr) connaissait le directeur du Musée (Julien Dumont, ndlr) depuis déjà 10 ans. Ils se sont retrouvés et on décidé de collaborer ensemble à travers cet événement.
Existe-t-il un partenariat entre le Paris Fan Festival et le Musée du Cinéma ?
Oui, tout à fait. Nous venons avec nos pièces, ils nous défrayent et nous leur faisons de la pub.
Une nouvelle section dédiée à l’Égypte au cinéma
Pour ce Paris Fan Festival, vous présentez la pyramide originale de Stargate. Comment s’est déroulée son acquisition ?
La pyramide appartenait à un collectionneur, qui l’avait exposé dans sa société, qui a fait faillite. Ça aurait été trop onéreux de la conserver pour la revendre, elle allait partir à la destruction. Cependant, une entreprise de Las Vegas, spécialisée dans les props, nous a contacté pour nous proposer de la récupérer. Sinon, ils l’auraient détruit.
Elle annonce également une nouvelle section dédiée à l’Égypte au Cinéma, pouvez-vous nous en dire plus ?
Je peux t’en dire un peu plus, mais pas trop, pour pas te spoiler ! Entre fin juin, début juillet (2024, ndlr), on n’est pas encore sûr des dates, on va créer un espace dédié à l’Égypte au cinéma. Donc une bonne partie sera consacrée à Stargate. Mais on aura aussi une vraie momie, qui a plusieurs milliers d’années. J’ai peur qu’elle aspire mon âme comme dans le film La Momie !
Vous aurez aussi un peu de Cinquième Élément ?
Oui, également. Enfin, on verra, c’est encore en cours de développement. Tout comme définir les différents espaces qu’il y aura.
Logistique impressionnante du Musée du Cinéma
De manière générale, comment se déroule l’acquisition des pièces issues de films ?
Alors il faut savoir que ce hobby n’est pas du tout français, c’est plutôt américain ou anglais. Lorsqu’un film se termine, il est très commun que tout soit revendu, à travers des maisons d’enchères. On peut aussi récupérer à prix fixe, sur des sites spécialisés. Ou encore, on connaît parfois des personnes qui ont travaillé dans le cinéma. Elles nous appellent depuis leur ateliers pour nous dire qu’elles ont telles ou telles pièces, dont ils ne se servent pas, à vendre ou nous donner. Par exemple, une personne qui a travaillé chez ILM (studio d’effets spéciaux de LucasFilms, ndlr), sur les Star Wars, qui est venue au Musée. Il a adoré et du coup nous a offert des storyboards.
Comment les choisissez-vous ?
Tout dépend ce qu’il reste disponible sur le marché, mais on essaye de prendre ce qui plaît à tout le monde. On ne choisit pas les films ou séries de cœur des membres du Musée, car ça marcherait pas forcément. C’est pourquoi on surfe plutôt sur les belles pièces et les tendances. Marvel par exemple est assez tendance.
Combien de temps peut s’écouler les acquisitions, entre le contact des propriétaires et l’arrivée de la pièce au Musée ?
Si c’est une maison d’enchère, c’est assez rapide. Ils finissent leur enchère, ils empaquètent et envoient. Si c’est un particulier qui revend, ça peut mettre 3 mois. Par exemple, le temps de convaincre de revendre une pièce, ça peut mettre des mois, voire des années, ça dépend. Mais globalement, quand je contacte des gens qui ont travaillé sur des films ou des séries, qui envoient hors canaux officiels, ça peut mettre que quelques semaines.
Conservez-vous toutes les pièces que vous obtenez ou avez-vous des partenariats pour envoyer des pièces dans d’autres établissements ?
Tout ce qu’on achète on le conserve, ça reste dans les réserves. Ça permet de faire un roulement avec les pièces du musée. On essaye de faire tourner régulièrement pour que ça ne soit pas tout le temps les mêmes. Sinon, là on a un partenariat avec Wes Anderson, dont on a reçu énormément de pièces, qu’on prête à d’autres musées. On en a aussi prêté à la Cinémathèque française, à l’occasion de l’exposition sur James Cameron, sur les films Alien, Abysse, les Terminator, etc… Ou encore à un autre musée à Nîmes, on leur a prêté la canne de Charlie Chaplin.
Personnellement, je suis allé au Musée de l’Image Animé à New York, dans le Queens. Avez-vous déjà eu un partenariat ensemble ?
Pas à ma connaissance, non. J’y suis allé à titre personnel, en 2017, pas avec le musée. Mais ça va se faire, je pense.
Vous possédez beaucoup de props et décors issus du cinéma Hollywoodien. Proposez-vous aussi la conservation de pièces venant du cinéma européen et d’ailleurs ?
Oui carrément. C’est juste qu’en France, on n’a pas de grosses productions style science-fiction. C’est donc plus compliqué d’acquérir des éléments. Typiquement, Plus Belle La Vie, on ne va pas récupérer les vêtements, les canapés, etc… car ce sont des trucs “normaux”. Pareil, si tu nous demandes un costume militaire d’un militaire dans Tenet, ça n’a pas trop d’intérêt. Nous, on essaye de récupérer des éléments avec de la fabrication derrière. Car on souhaite mettre en valeur les artistes issus du monde du cinéma, avec la création et l’imagination qui vont avec.
Gestion financière d’un tel établissement
Comment gérez-vous l’autofinancement du musée afin de garder son indépendance ?
Effectivement, nous n’avons pas de subvention, nous sommes totalement indépendants. Ce qui fait nos fonds, ce sont les visiteurs, qui payent leur entrée. On commence aussi à faire des privatisations. Par exemple, Apple nous a ramené 110 employés, qui avaient le musée pour eux uniquement, durant 3h. Pour le moment, les prêts de pièces restent encore gratuits, mais on nous paye le transport.
Vous arrivez à être rentables ?
Ça va, c’est bien, on peut tout payer. Mais ça pourrait être mieux, même si on arrive à en vivre.
À ce propos, quels sont les dépenses que le Musée doit effectuer ?
Le plus gros, c’est la masse salariale. Ensuite, l’espace de stockage. Aussi, on est comme les petits artisans, comme les boulangeries, on subit le coût de l’électricité. Les lampes, les toilettes, etc…
Un lieu emblématique qui bénéficie du soutient de ses visiteurs
Quels ont été les facteurs décisifs pour vous propulser n°1 des musée sur le cinéma dans le monde ?
C’est surtout grâce à notre collection. Après les studios comme Universal ou Warner, nous sommes le musée avec la plus grosse collection privée de pièces issues du cinéma au monde. C’est vraiment ça qui nous permet d’être numéro 1. Aussi, on est totalement indépendant, on ne passe par aucun prestataire intermédiaire. On gère nous-même notre réserve, la restauration de nos pièces, nos acquisitions. Par exemple, cela nous a permis de préparer l’exposition sur Wes Anderson en seulement 3 mois, car on peut aller beaucoup plus vite.
Pour la suite et fin, ce sont les propos de Julien Dumont, le directeur du Musée que j’ai recueillis.
Comment la pandémie et la fermeture des lieux culturels considérés comme non-essentiels a impacté le Musée ?
C’était une catastrophe. On a reçu aucune aide des pouvoirs publics ou mêmes des assurances pour lesquelles on était assurés. Heureusement, à la réouverture, on a eu des visiteurs très fidèles, qui ont permis de sauver rapidement le musée.
Êtes-vous arrivé à repartir comme vous le souhaitez depuis ?
Oui, on a complètement repris notre vitesse de croisière. Mais si tu connais des milliardaires prêts à faire des donations, tu peux leur dire !
Justement, en parlant de milliardaires. Votre musée est installé à Lyon, ville de naissance du cinéma et qui plus est, au cœur d’un bâtiment historique, datant de la Renaissance. Il est inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco. Comment s’est déroulée l’investissement du lieu grâce à votre mécène Gisela Oeri ?
Tu as bien fait ton travail de préparation. Gisela Oeri est une personne formidable, qui adore l’art et la culture. Elle possédait une collection de miniatures à la base. C’est grâce à ça qu’elle a rencontré Dan [Ohlman] (l’ancien directeur et fondateur du musée, ndlr) et a proposé cet écrin pour le musée.
D’accord, c’est donc vraiment une histoire d’amitié qui a créé cette aventure !
Complètement ! On va d’ailleurs fêter les 20 ans l’année prochaine.
Partie 2 : Conférence du Musée du Cinéma et du Miniature au Paris Fan Festival 2024
Je reviens également rapidement sur la conférence que le directeur du Musée du Cinéma, Julien Dumont, a donné lors du Paris Fan Festival. Et plus précisément sur 4 points qui m’ont marqué.
Des nouvelles acquisitions
Tout d’abord, mi-juin 2024, le musée a acquis une pièce toute particulière, à savoir un des casques originaux de Dark Vador de l’Empire Contre-Attaque. Nous avons eu l’exclusivité de l’annonce lors de la conférence, avec apparition d’un Dark Vador accompagné de ses Stromtroopers. Ils ont d’ailleurs fêté l’acquisition de la pièce à Lyon, en présence du sculpteur du casque, Brian Muir.
Pour la suite de la conférence, Julien nous a entre autre montré également un making of de l’acquisition de la Pyramide du film Stargate de 1994. L’objet gigantesque trônait d’ailleurs sur le stand du Musée lors de la convention. La vidéo a permis de nous rendre compte du travail et de la logistique que vit les équipes du musée. En sachant que seuls 10% de la collection n’est visible par les visiteurs. Le reste est dans de grandes réserves en sous-sol.
Qu’est-ce qu’un chasseur d’objets de collection ?
Aussi, c’était l’occasion pour nous raconter ce que ça fait d’être chasseur d’objets du cinéma et en quoi ça consiste. Déjà, c’est une passion à la base, juste un cinéphile qui aime garder des objets liés au films. Et comme Julien travaille dans le cinéma, il a pu garder des contacts, notamment à Hollywood, pour récupérer des pièces facilement. Mais c’est aussi une volonté de sauvegarde. Car comme il l’expliquait, les studios jettent la plupart des créations, faute de place de stockage. Ainsi, Julien a trouvé le bâtiment de son ami qui partait à la retraite, afin d’entreposer ses trouvailles. Cela sert d’archive et permet de présenter au grand public. Qui sont émerveillés à chaque fois, à contempler ses reliques et pourquoi pas s’inspirer en plus de faire rêver.
Enfin, Julien a répondu à ma question avant même que je la pose, concernant le Planet Hollywood de Disneyland Paris. En effet, ce restaurant cher à mon cœur, sur le thème du cinéma américain, a fermé ses portes en 2023. Mais les équipes du Musée du Cinéma ont été sur le coup dès que le soir de la fermeture ! Ainsi, ils ont pu sauver 90% des pièces du restaurant.
Retrouvez toutes les informations sur le Musée sur leur site officiel : https://www.museeminiatureetcinema.fr/